L’histoire de Valras et Sérignan est intimement liée. Le 15 décembre de l’an 878, l’évêque de Gérone vend le territoire de Valras à l’évêque de Béziers. Au pied de ce plateau rocailleux qui sépare les vallées de l’Orb et l’Aude, au bord de la 2ème embouchure de l’Orb s’élève l’abbaye de Saint Geniès, construite probablement vers 850. Les importantes possessions de l’abbaye, garrigues, bois, prés, jardins, vergers, vignes et marais salants, qui s’étendent entre Valras et Sérignan, deviennent en 1054, la propriété du chapitre de Saint Nazaire de Béziers.
Après l’assaut de Béziers pendant la croisade des Albigeois en 1209, et malgré la résistance des comtes de Toulouse contre Simon de Montfort, Béziers, Sérignan et Valras sont rattachés définitivement à la couronne de France. C’est approximativement à la même période que le sable accumulé par les courants, a obturé l’embouchure originelle de la Grande Maïre. Il ne reste alors à la rivière que le lit actuel pour sortir en mer (sauf périodes de crues).
En février 1286, la flotte aragonaise commandée par l’amiral Roger de Loria, se présente face à Valras.
L’infanterie débarque, s’empare et détruit le village ainsi que Saint Geniès, pendant que des galères légères remontent le fleuve et posent 2000 hommes et 100 cavaliers à Sérignan. Le massacre du « champ de la guerre » élimine une grande partie de la population masculine. Sérignan se relèvera rapidement de cette catastrophe guerrière, mais pas Valras. La présence continuelle de pirates barbaresques va empêcher la reconstruction du village côtier.
Les consuls de Vendres et de Sérignan autorisent les habitants de Vendres à faire paître leurs troupeaux sur ce terroir dévasté. En 1406, le sénéchal de Carcassonne et celui de Béziers donnent le territoire de Valras aux habitants de Sérignan.
Le port de Sérignan était déjà en plein essor (un parchemin daté de 1346 recense, à la demande du roi, l’activité du port). L’église Saint Martin de Valras était bien fréquentée par les fidèles. La renaissance commençait. Le port de Sérignan devient même siège d’amirauté, par décision de Louis XIII en 1630. Peu de vie animait les terres entre la mer et le coteau de Valras, là où s’étendaient des marécages et des marais salants, au bord desquels poussait une plante particulière, la salicorne (ou salicor). On en extrayait la soude, qui servait à la fabrication du savon.
En 1718, un industriel d’Agde donne une impulsion nouvelle à cette activité et le salicor revalorisé encourage les habitants à le cultiver. Sur les plages qui bordaient l’embouchure de l’Orb, la contrebande du sel était fort active. Les attaques par les corsaires des bateaux marchands aussi. Sous Napoléon, afin de surveiller surtout les navires britanniques qui croisaient au large, des gardes nationaux (8 Sérignanais et 7 Sauvianais) sont répartis sur les points d’observation de la côte valrassienne, De nombreux incidents se produiront avec les bateaux anglais à l’embouchure de l’Orb.
La renaissance de Valras
Par les crues périodiques et l’apport de sédiments, l’embouchure de l’Orb s’est peu à peu éloignée de Sérignan. Les pêcheurs et leur famille s’installent au début du XIXe siècle sur la rive droite dans des paillotes (photo titre). Tous participent à la traîne sur la grande plage (photo 1 en 1908).
En 1843, le premier hôtel se construit. Beaucoup suivront quand arrive l’âge d’or de la vigne (1860/1900), qui voit aussi de nombreuses villas bourgeoises s’élever (photo 2 : le Chalet Logé toujours debout). Un boulanger s’installe.
En 1868, François Andrieu est le premier à creuser un puits dans la nappe Senne (eau potable). Dès 1879, des wagons tirés par des chevaux desservent depuis Béziers la station naissante; plus tard le tramway modernise la ligne (photo 3 en 1904).
Avant la guerre de 14, la cité côtière a ressuscité et se développe. Le marché s’installe à l’entrée de la Grand’Rue (photo 4), aujourd’hui rue Charles Thomas.
La construction du grand casino commence en 1904 (photo 5), mais traînera quelques années. L’église est inaugurée le 7 juillet 1913, date à laquelle Sérignan-la-Plage n’est plus appelé que Valras-la-Plage.
La pêche s’intensifie avec les traditionnelles « barques catalanes » (photo 6 en 1928). Le développement extraordinaire qui suit la guerre, provoque une augmentation rapide de la population et un esprit communautaire s’installe, au point de faire émerger le voeu de création d’une commune indépendante de Sérignan. Le 18 février 1931 la Chambre des députés et le Sénat acceptent le projet La loi qui divise le territoire de Sérignan en 2 communes distinctes est donc promulguée par le Président Gaston Doumergue; Valras-Plage est né. Plusieurs siècles se sont écoulés depuis la disparition du vieux Valras bâti sur le coteau!
Pendant la centaine d’années précédentes, des pionniers anonymes ont permis cette renaissance et des noms plus connus l’ont concrétisée. Sans oublier les maires de Sérignan, Emest Blanchon et Roger Audoux, nous citerons le 1er maire de Valras-Plage, Alfred Panis, ses 2 adjoints, Jean Payre et Maurice Guérin, et les conseillers: Dauga, Soutier, Molinier, Leone, Calmette, Sonelli, Rousset, Fabre, Canton et Sauzet
Deux photos remarquables méritent aussi d’être montrées: le 24 mars 1931, l’avion Dewoitine « le trait d’union » piloté par Doré et Le Brix, survole le casino lors du record de distance en circuit fermé.
En 1904, la chevrière de Sérignan, sur la route de Valras, exactement à l’endroit où, 110 ans plus tard, a été construit le lycée Marc Bloch.
Cet article initialement publié dans le journal de Sérignan en 2014, a été rédigé par les membres de l’association Histoire de Sérignan ainsi que Gilbert Abbal, auteur du livre « Valras à travers les siècles ».